INTERVIEW EXCLUSIVE – AVEC L’ARTISTE MUSICIEN CAMEROUNAIS JANÉA « UN COMBAT POUR SAUVER LA MAISON BONADOUMA ET PRÉSERVER L’HÉRITAGE FAMILIAL »

L'artiste camerounais Janéa, reconnu pour son engagement envers ses racines et son héritage culturel, a récemment fait la une des journaux après avoir été incarcéré au commissariat central de Douala début octobre 2025. Accusé d'avoir résisté à la vente d'une maison familiale, il s'est retrouvé en cellule à la suite d'un conflit avec ses tantes paternelles, qui souhaitent s'approprier le terrain hérité de son père. Ce différend, qui dure depuis plusieurs mois, a suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux. Après plusieurs jours de détention, Janéa a été libéré le 1er octobre 2025. Dans l’une de ses premières prises de parole publique, il a accordé un entretien exclusif à Esbi Média, où il partage ses réflexions sur cette épreuve et son attachement à son patrimoine familial.
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L’artiste musicien camerounais JANÉA, de son vrai nom Paul-Henry Franck Ndoumbe Moukori, se distingue non seulement par sa musique, mais aussi par son engagement envers ses racines et son héritage familial. Dans une interview révélatrice accordée à Esbi Média, il aborde des thématiques profondes telles que l’importance de la maison Bonadouma, symbole de son histoire familiale, et les défis auxquels il fait face, face à des conflits internes sur l’héritage. Entre émotions, soutien et justice, JANÉA nous livre un témoignage sur son parcours et ses convictions, tout en soulignant l’importance des liens qui unissent les générations.

 

Journaliste (Esbi Média): Que représente pour vous la maison Bonadouma et quel lien personnel et familial y associez-vous ?

JANÉA (Artiste musicien) : Oui. La maison Bonadouma, c’est notre maison familiale. Mon père a été chef de la grande famille Bonatokoto pendant une trentaine d’années. C’est après mon grand-père. Je suis fier de ce que je représente, fier de ce que j’ai trouvé.

Journaliste : Quelle est la nature exacte de l’opposition que vous avez manifestée face à la vente de la maison familiale, et quelles ont été les conséquences de cette opposition ?

JANÉA : Si mon père n’avait pas été là, je ne serais pas là. Si son père, avant lui, n’avait pas été là, il ne serait pas là. Je pense que, quand on parle d’héritage, on ne parle pas que de murs. On parle d’émotions, de vécu, d’histoire. J’étais de ceux qui pensent que l’héritage ne se dilapide pas. J’ai été élevé ainsi, avec un père vigilant. J’ai entendu dire que l’on voulait vendre la maison familiale et je m’y suis opposé. J’ai découvert que l’un des bâtiments de mon grand-père était vétuste et devait être détruit. Donc, il a été détruit. On a essayé de savoir pourquoi, et j’ai été lésé.

Journaliste : Comment avez-vous réussi à tenir face à ces moments difficiles, surtout en voyant que d’autres détenus n’avaient pas le même soutien que vous ?

JANÉA : Ça a été un moment charnière, et je l’ai dit à ma sortie. La veille, j’ai craqué ; j’ai failli commettre l’irréparable, car je pensais aux miens. Ce qui m’a retenu, c’est l’amour et le soutien que j’ai reçus. Ils m’ont fait comprendre que je compte. J’étais en cellule avec d’autres, mais autour de moi, il y avait un défilé constant de visiteurs. Tandis que d’autres, juste à côté, n’avaient personne.

Journaliste : Comment comptez-vous rétablir la vérité dans cette affaire malgré les tensions familiales ?

JANÉA : Si je ne suis pas allé à New Bell (prison), c’est parce qu’il y a une justice dans ce pays. Oui, la justice va faire son travail. Les gens m’ont soutenu parce que j’ai dit non. Il y a des différends dans toutes les familles, souvent liés à des problèmes de succession. Quand on ne connaît pas bien les faits, on peut se retrouver en porte-à-faux.

Journaliste : Quelle est, selon vous, la véritable raison de ce conflit avec vos tantes ?

JANÉA : C’est une question de divergences de pensée. Je suis contre l’aliénation des terres ancestrales, ce qui crée des tensions.

Journaliste : Ce conflit touche à des symboles forts : la terre, la famille, l’héritage Sawa. Comment vivez-vous cela en tant qu’artiste et chef traditionnel ?

JANÉA : J’ai l’impression de voir mes aïeux mourir une énième fois. On bafoue des principes et des valeurs. Si tout est vendu, il ne reste plus d’histoire. Sans histoire, on devient étranger chez soi, déraciné.

Journaliste : Avez-vous déjà engagé ou comptez-vous engager des poursuites judiciaires contre certains membres de votre famille ?

JANÉA : On dit bien honore ton père et ta mère pour que tes jours soient prolongés. Je me suis défendu et je continuerai de le faire si nécessaire, mais je n’engagerai aucune action contre mes parents. Peu importe la situation, ils restent mes parents.

Journaliste : Vous êtes soutenu par une grande partie de la communauté artistique. Que représente cette solidarité pour vous dans cette épreuve ?

JANÉA : Il n’y a pas que les liens de sang qui définissent une famille. J’ai été profondément ému de découvrir que je comptais pour certains. Cela réchauffe le cœur de se sentir soutenu. Nous aspirons tous à un Cameroun uni, où le vivre-ensemble devient une réalité.

Journaliste : Un mot à vos fans, à votre famille, à ceux qui vous soutiennent dans cette période difficile ?

JANÉA : Il y a plusieurs jours, vous étiez des milliers à m’apporter votre soutien. Je ne vais pas simplement vous dire merci, car ce serait une ingratitude. J’ai tenu bon. Je suis passé de l’ombre à la lumière. Au nom des miens, je vous serai éternellement reconnaissant.

 

Il est essentiel de reconnaître que l’artiste musicien Janéa ne cherche qu’à défendre ses droits et son héritage familial, face à une situation qui le dépasse. Accusé à tort d’opposition à la vente d’une maison familiale, il incarne la voix de ceux qui se battent pour préserver leur patrimoine et leurs valeurs culturelles. Son engagement démontre non seulement son attachement à ses racines, mais aussi sa volonté de promouvoir un dialogue constructif au sein de sa famille. En fin de compte, Janéa mérite d’être soutenu dans sa quête de justice et de vérité, car son parcours est celui d’un artiste déterminé à protéger son héritage pour les générations futures. Sa résilience face à l’adversité est un exemple inspirant pour tous, rappelant que la défense de nos valeurs et de notre histoire est une lutte noble et nécessaire.

Propos recueillis par Joakim IPELA

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