EXCLUSIF – IMMIGRATION DES CAMEROUNAIS : L’APPEL DE L’ÉTRANGER, LE CRI DES CERVEAUX

L'immigration des Camerounais vers l'étranger a pris des proportions alarmantes ces dernières années, alimentée par une quête de meilleures opportunités économiques, d'éducation, et de conditions de vie plus favorables. Ce phénomène, souvent qualifié de "fuite des cerveaux", pose de sérieux défis au développement du Cameroun.
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Le Cameroun, riche en ressources naturelles et en capital humain, fait face à des difficultés économiques croissantes, à une instabilité politique principalement dans les régions anglophones du pays, ce qui a favorisé un système éducatif en crise. Ces facteurs incitent de nombreux jeunes diplômés, professionnels et talents à chercher fortune à l’étranger. Selon des études récentes de l’Institut National de la Statistique (INS), près de 40 % des étudiants camerounais envisagent de poursuivre leurs études à l’étranger, principalement en Europe et en Amérique du Nord.

Depuis plusieurs années, l’immigration des Camerounais vers le Canada s’est emballée. Le Cameroun est devenu le premier pays de citoyenneté des résidents permanents francophones hors Québec. Avec un taux de chômage réel estimé à plus de 75 %, un salaire moyen d’un peu plus de 600 dollars par mois et une inflation de près de 4 %, la population camerounaise n’arrive plus à joindre les deux bouts. La détérioration des infrastructures de santé et d’éducation, ainsi que le chômage élevé, poussent les jeunes à fuir. De janvier à avril 2024, près 6 000 camerounais ont immigré au Canada, portant à plusieurs centaines de milliers de personnes, le nombre de camerounais ayant choisi de s’expatrier vers ce pays et bien d’autres, depuis près de deux décennies. Le Cameroun est le deuxième pays au monde pourvoyeurs de main d’œuvre au Canada, juste derrière la France, renseigne le président du Groupement des Entreprises du Cameroun (Gecam). Proportionnellement, ce chiffre est en hausse par rapport à 2022 et 2023. Dans son rapport sur les perspectives de l’économie mondiale en 2050, le Fonds Monétaire International (FMI 2016), avait auguré que l’Afrique perdrait pas moins de 35 millions de travailleurs qualifiés partis rejoindre les pays du nord. Une main-d’œuvre et un savoir-faire indispensables pour bâtir une Afrique prospère.

Les tensions sociales et politiques, notamment dans les régions anglophones et du nord avec Boko haram, créent un climat d’incertitude. L’attrait des pays développés, souvent perçus comme des terres d’accueil offrant des salaires compétitifs et des conditions de travail meilleures, joue un rôle majeur dans l’expatriation grandissante des camerounais.

La fuite des cerveaux a des répercussions profondes sur le développement du Cameroun. Le pays perd non seulement des individus hautement qualifiés, mais aussi les investissements qu’ils pourraient apporter s’ils restaient. Ce phénomène contribue également à une stagnation des innovations et à un affaiblissement de la compétitivité nationale. Le gouvernement Camerounais a d’ailleurs pris des mesures pour réduire l’expatriation de ces fonctionnaires. Il s’agit de citoyens formés chacun dans son domaine de compétence et recrutés à la fonction publique; mais leurs conditions de vie et de travail ne semblent pas être à la hauteur de leurs espérances. Les salaires sont trop bas, avec absence d’un profil de carrière et d’un environnement professionnel garant de leur épanouissement. Les acteurs de la société civile et autres partenaires au développement se sont attaqués à la question de la fuite de cerveaux qui freine le développement du Cameroun, mais ces efforts restent insuffisants.

La fuite des cerveaux est un défi majeur pour le Cameroun qui nécessite une réponse coordonnée de la part des gouvernements, des entreprises et de la société civile. En agissant sur les causes profondes de ce phénomène, le pays peut espérer retenir ses talents et favoriser un développement durable.

Rédacteur : Joakim IPELA

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